"Qu'ils ont de la chance les peuples qui vivent l'hiver ! Ces quelques mois trop courts pour les uns, trop longs pour les autres, obligent à une adaptation sans cesse renouvelée, année après année. Changement de rythme, de vêtements, de loisirs, de nourriture, ces mois de blancheur proposent l'alternance. Cette périodicité est vitale. L'auteur blotti au fond d'un café griffonne et rafistole les mots qui seront chantés l'été prochain. Chacun doit user d'imagination pour faire face aux rigueurs de l'hiver, fréquemment perçu comme un obstacle... On entend souvent dire: «Il est âgé, passera-t-il l'hiver ?». Une frontière vers l'inconnu. Vouloir améliorer son sort, vivre plus facilement, voilà le propre de tout être intelligent et l'hiver contribue particulièrement bien à cette recherche de solutions. À nous de profiter de cette occasion. Plusieurs sociétés modernes ne cherchent pas à s'adapter, mais plutôt à éliminer les obstacles, les embûches. Quel dommage !
On veut éradiquer cette saison, standardiser nos vies. Les villes repoussent et pelletent l'hiver... mais l'hiver s'accroche. Il orne les balcons et dissimule les imperfections. Les enfants glissent, les joues rose saumon.
L'hiver est long pour celui qui lui tourne le dos. L'hiver est froid pour celui qui ne le touche pas."
Bernard Voyer, explorateur, "Aniu", chapitre "Neige".