Thursday, October 11, 2007

Homme vs Nature ?

Extraits du débat "L'homme ou la Nature, faut-il choisir ?", dans "Philosophie Magazine", no 13 (oct 2007):

Philippe Descola:
"Il est quand même frappant de voir à quel point Montaigne, père de l'humanisme occidental, s'émerveille de la capacité de raisonnement des animaux. Il n'établit pas de différence de nature mais de degré entre humains et non-humains. Cette différence de degré plutôt que d'essence avec le monde non-humain conduit à remettre en question la dissociation tranchée qui s'est établie à l'âge moderne - soit après Montaigne, notamment sous l'impulsion de Descartes - entre nature et culture."

En lisant ceci, j'étais conforté dans mon idée que nous ne sommes pas si différents des animaux, étant seulement le plus évolué des animaux. Mais le point de vue suivant se défend aussi:

Luc Ferry:
"Qu'est-ce qui justifie qu'on attribue à l'humain des droits et une telle supériorité par rapport aux arbres ou aux animaux ? Qu'est-ce qui définit sa compétence en tant que seul être moral ? Les humanistes ont cherché un critère de différenciation moral, pas un critère lambda. On aurait pu en trouver mille: les animaux n'ont pas de téléphone portable, ils ne fument pas, ils ne font pas cuire la nourriture. Je crois que c'est Rousseau qui le premier formule le bon critère. Ce n'est pas le langage qui caractérise l'humanité, le language n'est pas un critère moral. Le fait qu'un être parle ou ne parle pas est important pour un ethnologue. Pour un moraliste, cela n'a aucune pertinence. De la même façon, ce n'est pas l'intelligence qui compte. Une personne trisomique 21 mérite autant de respect qu'Albert Eisntein. Le critère de Rousseau est la liberté, comme arrachement à la tradition et au code de la nature [...]
«Le programme de la nature s'impose à l'animal, tandis que l'homme s'arrache à la nature pour entrer dans l'histoire.»[...]
Comme le dit encore Vercors dans sa fable Les Animaux dénaturés (1952), pour porter un jugement de valeur, il faut être en écart par rapport à la nature. L'animal fait un avec la nature, l'homme fait deux et là est le secret de ses pouvoirs de destruction comme de protection..."

Cet argument rejoint celui des religions monothéistes, qui n'octroient une âme qu'aux êtres humains car ce sont les seuls à avoir la liberté d'aimer ou de haïr, de choisir le bien ou le mal.
Mais est-on si sûr qu'aucun animal n'ait cette faculté ?
Je pense par exemple à ces chiens qui se laissent mourir sur la tombe de leurs maîtres. Suivent-ils en cela le programme de la nature ? Ou au contraire ne montrent-ils pas une capacité à aimer, d'une façon dont bien des humains seraient incapables ?
Comme le dit Renaud dans sa chanson Baltique:

"Et dire que ça se veut chrétien
Et ça ne comprend même pas
Que l'amour dans le coeur d'un chien
C'est le plus grand amour qui soit
[...]
Je pourrais vivre dans la rue
Etre bourré de coups de pieds
Manger beaucoup moins que mon dû
Dormir sur le pavé mouillé
En échange d'une caresse
De temps en temps d'un bout de pain
Je donne toute ma tendresse
Pour l'éternité ou plus loin
Prévenez-moi lorsque quelqu'un
Aimera un homme comme moi
Comme j'ai aimé cet humain
Que je pleure tout autant que toi"

1 comment:

Didier Barthès said...

En effet, il y a continuité dans la nature et l'homme n'est qu'un animal de plus, c'est lui qui a le cerveau le plus sophistiqué sans doute, mais il est quand même un animal. Et la conscience est répartie, elle est plus forte chez l'homme, elle n'est pas absente chez les autres animaux.
sin